Voisins vigilants : un concept qui fait peur ?
Devant certaines réactions exprimées en réunion du comité de quartier de vendredi dernier, il est légitime de se demander si le concept de voisins vigilants ne fait pas un peu peur… Peur de s’engager dans quelque chose qu’on ne contrôle pas, peur de tendre le dos à la critique, peur d’avoir à faire confiance à autrui, peur d’avoir une tâche compliquée à accomplir… Qu’en est-il ?
Autrefois, si une maison prenait feu, chacun cessait son activité pour faire la chaîne des seaux et contribuait à éteindre l’incendie. Puis participait à la reconstruction… Chacun apportait ce qu’il pouvait, ne serait-ce qu’un peu de réconfort ! De nos jours, nous avons des assurances ! Et les pompiers ! Mais au-delà de cela, chacun se tourne vers soi même, le voisin est parfois un total inconnu… on le fréquente parfois, parfois pas ! En aurions-nous peur ?
La peur n’est pas bonne conseillère. Les compagnies d’assurances font leurs choux gras de ce climat de peur et d’insécurité en vendant des alarmes et des systèmes sophistiqués de télésurveillance… Qui leur rapportent plein de sous tout en accentuant le repli de chacun sur son petit chez soi. Et on bâtit des murs, avec des caméras de vidéosurveillance et des alarmes…
Voisins vigilants, c’est le contraire ! On ne construit plus de murs et autres défenses… Fi du repli sécuritaire, on va vers l’autre, on recrée un peu de solidarité, d’humanité entre nous. Le voisin fait partie de notre monde, il a des choses à nous apporter et nous en avons à lui offrir de même : là est l’idée. Les enfants de tel voisin qui restent seuls chez eux l’après midi en attendant le retour de Papa et Maman du travail… la vieille dame qui vit seule au coin de la rue, là bas… tout ce petit monde existe et fait partie du nôtre : c’est une force que l’on peut mettre au profit de notre qualité de vie, celle-ci incluant notre sécurité.
En fait, tous, peu ou prou, nous pratiquons le concept « voisins vigilants » sans le savoir ! Lorsqu’on regarde par la fenêtre et qu’on se dit : « tiens, voilà Monsieur Machin qui va faire ses courses ! »… Il suffit qu’alors, si on remarque une présence anormale chez lui pendant ce temps-là, on se dise aussi « tiens, qu’est-ce que c’est que ça ? »… Et voilà, on est rentré dans le concept. On peut agir, appeler les gendarmes.
Formaliser le concept, c’est juste se dire entre voisins, «je serai absent du tant au tant juillet… si tu vois quelqu’un chez moi, c’est un voleur» !!! Alors, appeler la gendarmerie n’est plus qu’une opération de simple logique. Et c’est à cela que se borne le «voisins vigilants» : appeler les secours quand le besoin est identifié. Se fédérer pour cela est un moyen de réduire les fausses alertes et d’améliorer l’efficacité des gendarmes.
Plus il y aura de gens qui nouent un réseau étroit de ce type, plus le risque qu’une personne puisse pénétrer chez autrui diminuera. Et ce réseau s’accompagne nécessairement de rapprochements comme on en voit (trop peu hélas !) lors de nos « fêtes des voisins » ! On se parle, on prend un verre ensemble, on a des relations amicales… C’est également porteur de bons moments, de relations améliorées !
Alors n’hésitons pas : ouvrons nous un peu à nos voisins, offrons leur notre vigilance : ils nous le rendront bien !
3 Comments
[…] partage l’avis de Nicolas Meyer dans son article Voisins vigilants : un concept qui fait peur ? En particulier ce passage : Et ce réseau s’accompagne nécessairement de rapprochements comme on […]
Nicolas, me connaissant tu admettras volontiers que mes réserves ne sont pas motivées par la peur de m’ouvrir aux autres.
Non, c’est un réflexe viscéral : ma famille de résistants a vécu des évènements dramatiques entre 1941 et 1944 grâce à des voisins vigilants ; plus amusant, passons sur la voisine vigilante qui rapporta à mes parents mes tendresses envers une jeune fille …
Ce que je crains, c’est l’institutionnalisation de cette initiative (voir circulaire de Claude Guéant du 22 juin ouvrant la porte à des « collaborateurs occasionels » LOPPSI 2 éventuellement indemnisables)
Ce que je crains c’est la tentation de dérives portant atteinte à la liberté individuelle, déjà observées ici et là et dénoncées par la Ligue des Droits de l’Homme.
Je crois en ta bonne foi et j’apprécie ton altruisme, mais ne nous trompons pas de « repli sécuritaire ». Je ne souhaite pas voir le panonceau jaune à oeil dardé à l’entrée du Val. Je pratique déjà une partie du concept bien sûr, en bonne entente avec mes voisins. Le désir de rapprochement auquel je souscris aussi est pour moi mieux fondé sur la convivialité et les services réciproques que sur la peur du voleur.
[…] Pour Michel Meunier un habitant du Val d’Albian le concept de relais entre les citoyens et la police risque de « réveiller le côté sombre de certaines personnes. Pendant la dernière guerre mon père a été arrêté par la Gestapo sur de fausses accusations de « bons » français collabos… et des cousins résistants furent également arrêtés suite à des dénonciations, alors permettez-moi de ne pas faire une confiance aveugle dans les bonnes intentions de tous. Ce que je crains c’est la tentation de dérives portant atteinte à la liberté individuelle, déjà observées ici et là et dénoncées par la Ligue des Droits de l’Homme. Lire son commentaire lors d’un précédent article sur ce sujet. […]