Dans le nouveau bidonville face à Usine Center, c’est une lutte quotidienne pour survivre
Chatenay-Malabry – Vendredi 25 Septembre 2009 — Alina Rupa, 27 ans est la mère d’un garçon d’une dizaine d’années. Elle a des yeux vifs et un grand sourire. Elle habite à 8 minutes du Val d’Albian avec son fils dans le camp de Roms situé le long de la N118 devant Usine Center. C’est elle qui, lors de ma première visite dans ce bidonville, sera mon interprète.
Un groupe d’homme vient à ma rencontre. Ils veulent savoir si je suis de la police, de la préfecture… Mme Rupa m’explique que lundi, la police a fait une descente.
Un homme me montre un papier expliquant qu’il devait quitter la France sous 30 jours.
A la Mairie de Vélizy-Villacoublay, le chef de la Police Municipale dit que « le terrain vague où Mme Rupa et les 57 autres Roms vivent, appartient au Conseil Régional de l’Essonne ; Il est situé sur la commune de Châtenay-Malabry. « Lundi, indique t-il, un comptage a été effectué… ».
Catherine Dessus est membre d’un collectif rattaché à RomEurope. Elle suit et soutient ce groupe de Roms depuis deux ans. « Les cars de police sont partis avec 25 Roms. Le soir ils sont rentrés de différents commissariats avec une mise en demeure de quitter le territoire sous 30 jours ».
« Ils n’ont nul part où aller » dit-elle. « Ils vont retourner en Roumanie mais ils reviendront. Par rapport à la ségrégation et la pauvreté qu’ils connaissant en Roumanie, leur situation ici leur semble meilleure».
Pourtant la vie n’est pas rose pour Mme Rupa. Elle doit acheter de l’eau en bouteilles pour faire la cuisine et se laver. Si elle arrive à survivre, c’est en grande partie grâce au soutien du comité de soutien de Mme Dessus, d’un collectif d’élus de Bièvres et de la Croix Rouge.
Ces difficultés ne découragent pas les familles qui arrivent depuis mai dernier sur ce terrain. Le 12 septembre dernier, tout un groupe est venu construire de nouvelles baraques, après qu’un incendie ait détruit leur camp le long de la N118 à Vélizys.
La forêt de Verrières borde leur terrain et leur fournit le bois dont ils ont besoin pour la construction des cabanes.
Il y a en Europe entre 10 et 12 millions de Roms. C’est presque l’équivalent d’un état grand comme la Belgique. La Roumanie compte la plus grosse communauté de Roms en Europe et depuis son entrée dans l’Union Européenne, cette population peut désormais voyager dans les autres états membres. En France le ministère de l’immigration estime leur nombre à 7000.
Quand un Rom roumain ou bulgare installé en France ne peut pas justifier d’un revenu suffisant, il est raccompagné dans son pays. Il reçoit une aide financière de 300 euros par adulte et 46 euros par enfant.
Malgré tout à entendre Mme Rupa les Roms sont heureux ici : « les français sont très gentils et on peut trouver des petits boulots, des ménages. Les hommes, eux, demandent de l’argent pour manger », dit-elle.
Mme Rupa, accompagnée par un groupe d’hommes, de femmes et une ribambelle d’enfants, me fait visiter les « maisons ». Je lui demande s’il n’y fait pas trop froid. Elle rit et m’explique le fonctionnement de son « poêle » de fortune.
Un fût de 200 litres dans lequel a été découpée une porte est placé dans un angle à l’entrée de la cabane. De chaque côté, le mur en planches est protégé par des tôles. Un tuyau de gouttière relie le fût au toit en guise de cheminée. « La fumée ? Non ce n’est pas grave, au moins ici il ne fait pas froid. »
Pour Mme Dessus, « les Roms sont déconcertants. Il est difficile de savoir ce qu’ils souhaitent vraiment. La plupart n’espère plus trouver de travail en France et encore moins en Roumanie. Ils n’ont droit à aucune aide en France. »
« Les municipalités ne souhaitent pas voir les Roms s’établir ici, ajoute-elle. Il nous a été impossible d’obtenir le raccordement à l’eau, le ramassage des ordures ou encore la scolarisation des enfants. »
« La situation dramatique des Roms ne peut être réglée depuis Bruxelles », avait averti le Président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, à l’ouverture d’une réunion sur ce sujet en mars 2009. « Les instruments pour créer ce changement sont dans les mains des Etats membres. Les politiques pour l’intégration des Roms sont de la compétence des Etats membres », a-t-il insisté.
Déjà le 16 septembre 2008, Christine Boutin, s’était engagée à soumettre des propositions d’actions concrètes en faveur des Roms lors d’un sommet européen.
[Conférence de presse de Vladimír Špidla, Christine Boutin et Georges Soros, sur les Roms
Vladimír Špidla, membre de la CE chargé de l’Emploi, des Affaires sociales et de l’Egalité des chances, Christine Boutin, ministre française du Logement de la Ville, représentant de la présidence du Conseil, et Georges Soros, président de l’Open Society Institute, ont donné une conférence de presse sur les Roms, suite au premier sommet européen consacré à l’amélioration de la situation des communautés Roms dans toute l’Union.]
En attendant, Mme Rupa se prépare à l’hiver.
« A notre niveau nous ne pouvons rien, » martèle Mme. Dessus. « Le gouvernement et les régions doivent agir » !
Alors, elle continue à aider ce groupe de personnes à vivre au jour le jour en leur apportant des produits de première nécessité et surtout des aliments frais et des laitages pour les enfants dont ils manquent cruellement.
Vous pouvez vous exprimer à ce propos sur le Forum.
Pour en savoir plus sur les Roms et pour agir:
Contacter MonSaclay pour entrer en contact avec le Collectif de Mme Dessus
L’Union européenne et les Roms
http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=518&langId=fr
Le CNDH Romeurope
First EU Roma Summit
16/09/2008
http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=423&langId=fr&eventsId=105&furtherEvents=yes
Que savons-nous des Roms ?
L’Union européenne compte aujourd’hui entre dix et douze millions de Roms, soit presque l’équivalent de la population d’un État membre de l’UE de taille moyenne comme la Belgique ou la Grèce. Bien que les Roms fassent partie intégrante de l’histoire et de la culture européennes depuis plus de sept siècles, ils restent méconnus de la plupart d’entre nous. D’ailleurs, ce que nous croyons savoir repose le plus souvent sur l’ignorance, les préjugés et les stéréotypes. Il en résulte que des millions de Roms de l’UE sont actuellement confrontés à des niveaux extrêmes d’exclusion sociale. (Source : http://ec.europa.eu)
Dix repères de base pour les mieux connaître.
Par Jean-Pierre Dacheux
- Les Rroms ne s’appellent pas Rroms parce qu’ils sont des Roumains ! Beaucoup de Rroms ne sont pas roumains. Ils sont encore moins romains (de la ville de Rome). Rrom est un mot qui veut dire « homme ». Pourtant, en Europe, c’est en Roumanie qu’on compte le plus grand nombre de Rroms (plus de 2,5 millions).
- Les Rroms ou Tsiganes sont venus du nord de l’Inde, il y a au moins sept siècles. En France, à part les 5 000 à 6 000 Rroms étrangers, roumains ou bulgares, ils sont tous français et installés en France depuis de nombreuses générations. Ce ne sont donc pas, en général, des étrangers. Les Français tsiganes (appelés aussi Manouches, Gitans) sont sans doute plus de 400 000.
- Les Rroms sont presque tous européens. Ceux qui vivent dans d’autres continents (en Amérique latine par exemple), sont beaucoup moins nombreux. On compte au moins 12 millions de Rroms en Europe (ils sont présents aussi au-delà des 27 États, en Ukraine et en Russie, dans les pays des Balkans, en Turquie …).
- Les Rroms se disent Rroms (avec 2 r) parce que, dans leur langue, la langue rromani, on prononce un r qui n’est pas le nôtre. Eux nous appellent les gadjé, (on dit : un gadjo , une gadji, des gadjé), c’est-à-dire les non Rroms.
- Les Rroms ne sont pas des nomades, même ceux qui vivent en caravanes. D’ailleurs, les Tsiganes sont une minorité à vivre en caravanes et il n’y a de caravanes que dans l’ouest de l’Europe, notamment en France.
- Les Rroms ont été tenus en esclavage dans deux provinces de l’actuelle Roumanie (la Moldavie et la Valachie ou Munténie) pendant cinq siècles ! C’est peu connu. Et pourtant, cela fait partie de l’histoire de l’Europe ! Ils n’ont été libres qu’au moment de l’abrogation de l’esclavage des Noirs, au milieu du 19e siècle.
- Les Rroms ont été traités comme les Juifs. On a voulu les faire disparaître de notre planète. Les nazis, entre 1933 et 1945, en ont fait mourir plus d’un demi million. Cela s’appelle un génocide (un génocide, c’est la mise à mort d’une population entière sur ordre d’un État).
- 8 – Les Rroms n’ont pas de pays en propre. C’est un peuple sans territoire compact, réparti dans tous les pays d’Europe. Ils ont la nationalité du pays où ils sont installés. Ils ont une langue, des coutumes, une conception de la vie en famille qui leur sont propres. C’est ce qu’on appelle une ethnie (un mot qu’il faut comprendre comme représentant une minorité culturelle et nullement un groupe racial !).
- Les Rroms sont connus pour être artistes. Ils ont la culture de la musique. Il y a parmi eux de très grands musiciens. Le violon, la guitare, la cymbalum, la clarinette et tous les instruments de percussion sont leurs instruments préférés. On les connaît aussi dans les arts du cirque.
- Les Rroms sont souvent religieux et adoptent volontiers la religion du pays où ils vivent : catholiques en Espagne, protestants et catholiques en France, orthodoxes en Serbie, musulmans en Albanie…
(Source : http://www.romeurope.org)
12 Comments
Les Roms roumains demandent le droit au travail. Pour comprendre leur situation, voici quelques extraits du rapport 2008 de Romeurope :
Les traités d’adhésion d’Athènes en 2003 (pour dix États) et de Luxembourg en 2005 (pour la Bulgarie et la Roumanie) ont ouvert la possibilité aux pays de l’Union européenne d’imposer aux nouveaux membres une période transitoire durant laquelle des restrictions peuvent être apportées à l’accès des ressortissants de ces États à une activité salariée…..En France, le régime transitoire sera prolongé au moins jusqu’en 2011. Le principe adopté durant cette période en matière de circulation des salariés est le suivant : les ressortissants de ces deux derniers États adhérents sont soumis aux mêmes règles que les travailleurs étrangers non communautaires. Cela signifie notamment : 1) qu’ils doivent solliciter une autorisation de travail préalablement à toute embauche ; 2) que la situation du marché de l’emploi (en clair le chômage) en France peut leur être opposée (c’est cette condition qui a été levée sur une liste de métiers sous tension; 3) que l’employeur doit payer une redevance minimale de 893 € à l’ANAEM (redevance dont la légalité est d’ailleurs contestable 4) et que les ressortissants de ces États ne peuvent s’inscrire comme demandeurs d’emploi à l’ANPE sans un titre de séjour 64 , titre auquel ils n’ont généralement accès… qu’à la condition d’avoir déjà obtenu un emploi.
[…] Voir l’article de MonSaclay sur les Roms […]
Félicitations pour le ton sérieux et neutre de cet article et le rappel de l’histoire des Rroms, qui ils sont et d’où ils viennent. C’est assez rare pour être souligné. Et merci de mettre en lumière la situation des Rroms, qui est souvent dissimulée à la population de peur de voir surgir les polémiques.
Y a t’il des associations d’aide aux Rrom en dehors du comité de soutien de Mme Dessus ?
Merci de mettre en lumière la situation de ces Rroms, trop souvent oubliés, ou cachés. Et félicitation pour le ton neutre et sérieux de votre article et le rappel historique.
Bonjour à tous,
J’ai vu que le campement a été rasé le Jeudi 12 Novembre, tot dans la matinée. Je suis passé en voiture le long de la N118. Il y avait des pelleteuses sur le terrain.
Est-ce que quelqu’un sait ce qui s’est passé pour les habitants du bidonville. Je suis étonné de ne trouver aucune information sur le net.
Cantepien
[…] lecteur de Monsaclay demandait samedi des nouvelles des Roms dans un commentaire : « Bonjour à […]
[…] L’Inimaginable Pauvreté des Roms du Petit-Clamart – 6 commentaires […]
[…] L’Inimaginable Pauvreté des Roms du Petit-Clamart […]
[…] Une vingtaine de cabanes ont brulé. Voir article précédent (27/09/2009) […]
Bonjour, éducateur spécialisé dans un foyer de type MECS ( maison d’enfant à caractère social) à Verrière le Buisson, je souhaiterais entrer en contact rapidement avec les différentes associations en liens avec la populations Roms de se terrain.
En effet, compte tenue de notre proximité géographique, l’entièreté des acteurs sociaux-éducatif de notre équipe, sommes soucieux de construire un projet commun de partenariat. Nous recherchons essentiellement à fédérer ses associations dans le cadre d’une soirée « loto » ou 50% des bénéficie leurs serait reversés afin, entre autre, de contribuer à l’améliorations de leurs conditions de vie ainsi que leurs insertions sociaux-professionnelles.
Je me tien à votre entière disposition afin de vous apporter tout les renseignements complémentaire qui vous serait nécessaire.
Cordialement.
Equipe éducative des Acceuil Educatif de la Bièvre.
Mail: [email protected]
[…] premier article sur les Roms du Petit-Clamart date du 27 septembre 2009. Cinq ans plus tard le camp est toujours, […]
[…] Lire également : L’Inimaginable Pauvreté des Roms du Petit-Clamart […]